Au Canada, les trentenaires diplômés s'entassent chez leurs parents face à l'immobilier à 1 million de dollars.
En France, les fermetures d'usines s'accélèrent et la fuite des cerveaux s'intensifie. Ce ne sont pas trois crises distinctes, c'est la même stratégie : le "managed decline", en français le déclin organisé.
Qui gagne dans ce système ? La France peut-elle encore échapper à ce destin ?
Une Mécanique Commune, Des Symptômes Identiques
Loin d'être des crises isolées, les difficultés de ces trois pays suivraient une même logique implacable. Les symptômes sont partout les mêmes : stagnation des salaires, explosion de l'immobilier, démantèlement des services publics, dette qui s'envole. À cela s'ajoutent trois piliers d'une stratégie délibérée : désindustrialisation massive, financiarisation de l'économie et immigration de masse.
Le résultat ? La disparition programmée de la classe moyenne. Et selon cette analyse, rien n'est laissé au hasard. La France suivrait simplement le même chemin, avec une décennie de retard sur ses voisins anglo-saxons.
Le Royaume-Uni : Laboratoire Grandeur Nature
Tout a commencé avec Margaret Thatcher dans les années 80. Sa guerre déclarée à l'industrie britannique, jugée trop coûteuse et syndiquée, a marqué le début d'une transformation radicale. Des régions entières ont été sacrifiées - mines fermées, aciéries démantelées - pendant que Londres devenait une "machine à cash" générant 23% du PIB national.
Les conséquences sont aujourd'hui dramatiques. Hors de la capitale, les salaires stagnent à 33 000 livres contre 44 000 à Londres. L'espérance de vie recule dans certaines régions. Le NHS, fierté nationale, agonise avec 7,7 millions de personnes en attente d'opération et 100 000 postes d'infirmières vacants.
L'image la plus saisissante ? Des infirmières britanniques faisant la queue aux banques alimentaires en 2023. Une scène qu'on croyait réservée aux pays en développement.
Depuis 2008, les salaires britanniques n'ont pas progressé. Pire : ils restent 2% plus bas qu'avant la crise financière. Seize ans sans amélioration du pouvoir d'achat. Le Brexit, présenté comme une solution, n'a fait qu'aggraver la situation avec une chute de 20% des échanges européens dès janvier 2021.
Le Canada : L'Eldorado qui se Fissure
Le Canada, longtemps perçu comme un eldorado, révèle ses failles. Sa croissance repose artificiellement sur deux piliers fragiles : l'immobilier et l'immigration massive.
Les prix de l'immobilier ont bondi de 33% depuis la crise sanitaire. Résultat : les jeunes diplômés restent chez leurs parents jusqu'à 30 ou 35 ans, incapables d'accéder à la propriété. Le pays accueille entre 400 000 et 500 000 nouveaux arrivants par an - plus d'un million en 2023 - mais les infrastructures ne suivent pas.
Il manquera 3,5 millions de logements d'ici 2030. Les hôpitaux et écoles sont déjà saturés. Le système de santé canadien manque de 6 650 médecins, soit 2,5 pour 1 000 habitants contre 3,6 en moyenne dans l'OCDE.
Paradoxe troublant : la population augmente de plus de 3% par an tandis que l'espérance de vie recule. La dette publique, elle, a explosé : de 36% du PIB en 2010 à plus de 110% aujourd'hui.
La France : Le Déni Tranquille
La France suit la même trajectoire, avec une décennie de retard. Depuis le début des années 2000, elle a perdu près de la moitié de ses emplois industriels. La part de l'industrie dans le PIB est passée de 25% à seulement 10%.
Cette désindustrialisation creuse les inégalités territoriales. Paris et quelques métropoles concentrent 70% des créations d'emplois qualifiés et 80% des investissements publics. Pendant ce temps, petites villes et zones rurales voient disparaître services publics et commerces.
L'immobilier a triplé en 20 ans dans les grandes villes, transformant l'accès au logement en facteur d'exclusion. Les classes moyennes s'endettent sur 25 ou 30 ans pour se loger.
Les services publics craquent : 13% des lits d'hôpitaux fermés, sous-effectif chronique des enseignants, Sécurité sociale sous pression avec 30 milliards d'euros de dette depuis le Covid.
La dette publique a franchi les 3 300 milliards d'euros, soit plus de 110% du PIB. Un niveau inédit en temps de paix, malgré une pression fiscale parmi les plus élevées d'Europe.
Le Plan en Six Étapes
Cette analyse révèle un plan méthodique pour "détruire un pays en profondeur" :
1. Détruire l'industrie par des délocalisations justifiées par la compétitivité
2. Faire flamber l'immobilier grâce aux taux bas, enrichissant les propriétaires et endettant les jeunes
3. Importer artificiellement de la croissance via l'immigration et l'endettement
4. Privatiser les services publics pour générer des profits à court terme
5. Décourager la jeunesse par l'explosion des coûts d'études et de logement
6. Culpabiliser les citoyens en leur faisant croire que l'échec du système est leur faute
Les Vrais Gagnants
Ce système, destructeur pour la majorité, profite à une minorité :
Les responsables politiques, souvent multipropriétaires, s'enrichissent avec la flambée immobilière. Leurs enfants accèdent aux meilleures écoles privées, échappant à la dégradation des services publics.
Les grandes entreprises externalisent leur production, réduisent leurs coûts, maximisent leurs marges et utilisent une main-d'œuvre étrangère moins chère.
Les banques, véritables moteurs de cette mécanique, profitent de l'endettement généralisé. Chaque point de dette génère des revenus supplémentaires pour le secteur financier.
Les fonds d'investissement étrangers rachètent les actifs stratégiques des pays en déclin : immobilier, infrastructures, santé, énergie. Tout devient marchandise.
Des Alternatives Existent
Pourtant, d'autres voies sont possibles. La Suisse maîtrise sa politique migratoire, évite la bulle immobilière et maintient des services publics efficaces. Les pays nordiques comme la Norvège investissent dans la formation et la santé tout en encadrant les excès de la mondialisation.
La France Peut-elle Encore s'en Sortir ?
Le futur n'est pas écrit. Le modèle anglo-saxon n'est qu'un choix, non une fatalité. La France dispose encore d'atouts : ses savoir-faire, son agriculture, sa jeunesse éduquée, son outil énergétique.
Pour inverser la tendance, il faut d'urgence revaloriser le travail, réindustrialiser, stopper la fuite des cerveaux, désendetter proprement, protéger les services publics et retrouver de l'indépendance.
Cela suppose de sortir de la crise politique, d'abandonner la logique de "l'État start-up" et surtout de reprendre le pouvoir à ceux qui ont choisi la voie du déclin.
Les dix prochaines années seront décisives. La question n'est plus de savoir si ce diagnostic est exact, mais si nous aurons le courage de changer de cap avant qu'il ne soit trop tard.
Déclin_organisé__décryptage_de_la_thèse_MoneyRadar_au_Royaume-Uni,_Canada_et_en_France.m4a (11.61 Mo)
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