Pourquoi l’IA se diffuse-t-elle aussi vite ?
Historiquement, il fallait des décennies pour qu’une innovation transforme la société. L'électricité, le PC, même Internet : il a fallu attendre plus de 20 ans avant qu'ils s’imposent partout. L’IA, elle, s’impose en un éclair. Cette fulgurance s’explique par trois facteurs :
- Facilité d’usage : pas besoin d’être ingénieur pour utiliser Claude, ChatGPT ou Gemini. Une simple phrase suffit.
- Progression technique : chaque mois apporte son lot de nouveautés, d’outils plus performants, de modèles plus puissants.
Un monde à plusieurs vitesses
Si l’IA est accessible à tous, elle n’est pas adoptée partout de la même manière. Le rapport Anthropic introduit l’« Indice d’adoption IA » (AUI), qui compare l’utilisation réelle de l’IA à ce qu’on pourrait attendre selon la taille de la population active d’un pays.
- Israël : les utilisateurs exploitent l’IA 7 fois plus que ce que la taille de leur marché du travail laisserait supposer.
- Singapour : 4,6 fois plus.
- France : 1,9 fois plus — nous sommes donc légèrement au-dessus de la moyenne mondiale.
La raison ? Accès à Internet, structure économique, politique d’innovation, compétences numériques, confiance dans la technologie…
À quoi sert vraiment l’IA aujourd’hui ?
Dans tous les pays, l’usage le plus courant reste… le développement informatique. Environ 36 % des requêtes à Claude concernent du code : génération, correction, automatisation. Mais dans les régions où l’IA est la plus avancée, on assiste à une diversification :
- Les usages éducatifs et scientifiques progressent nettement : rédiger des cours, synthétiser des recherches, produire de la documentation.
- Les tâches purement administratives et créatives (écriture, traduction, gestion de documents) gagnent du terrain.
Autre point marquant : on apprend à déléguer ! Les utilisateurs confient de plus en plus de tâches complètes à l’IA, sans vouloir intervenir ni ajuster le résultat. Ce mode « directif », où l’on délègue l’intégralité de la tâche à Claude, est passé de 27 % à 39 % des usages en huit mois seulement.
Des entreprises en mode automatisation
Côté entreprises, l’enjeu est clair : l’IA est massivement déployée via API pour automatiser des tâches, souvent répétitives ou à faible valeur ajoutée. 77 % de l’adoption via API repose sur cette logique d’automatisation. Le coût n’est pas le premier critère : c’est surtout l’impact potentiel sur la productivité qui motive les investissements.
Mais pour aller plus loin que l’automatisation basique, il faut croiser l’IA avec les données métiers de l’entreprise. C’est là que le bât blesse : enrichir les modèles avec le bon contexte, s’assurer de la qualité des données, nécessite du temps, de l’argent et souvent une vraie transformation interne.
L’IA, facteur d’inégalités ?
Le rapport tire la sonnette d’alarme : la course à l’IA avantage avant tout les régions et entreprises déjà bien dotées en capital humain et technique. Résultat : risque d’accentuation des fractures numériques et économiques. Les bénéfices de l’IA risquent donc de retomber principalement sur les zones les plus riches, accentuant les écarts déjà profonds entre Nord et Sud, mais aussi entre métropoles et périphéries.
Faut-il s’inquiéter ?
Oui, un peu. Comme à chaque révolution industrielle, les premiers équipés prennent une avance parfois durable. Mais l’histoire montre aussi que les vagues d’innovation finissent, à force d’efforts politiques, d’éducation et d’adaptation, par se diffuser plus largement.
Conclusion
Ce rapport offre une photographie inédite : jamais une technologie n’aura progressé aussi vite… ni creusé autant d’écarts aussi rapidement. L’IA est à la fois une promesse de modernisation et un risque d’exclusion pour les moins bien préparés.
En tant que citoyens, consommateurs, salariés ou dirigeants, il est crucial de mesurer ces dynamiques : pour profiter au mieux de l’IA… sans laisser de côté ceux qui n’ont pas encore la chance d’en bénéficier pleinement.
Source :
https://www.anthropic.com/research/anthropic-economic-index-september-2025-report