Le message central Oui, la fiscalité du capital influence les expatriations des plus aisés.
Non, les flux ne sont pas massifs et l’effet agrégé sur l’économie reste modeste.
Le vrai trou dans la raquette des recettes publiques vient plutôt des stratégies d’optimisation et d’évasion que des valises qu’on boucle. Ce que disent les données Des départs rares chez les plus aisés: environ 0,2% par an pour le top 1% des revenus du capital, soit moins que la moyenne de la population (0,38%).
Des réactions mesurables aux réformes:
2012-2013 (fin de l’option d’imposition forfaitaire sur les dividendes/plus-values, hausse des prélèvements sociaux): hausse des départs nets de 0,04 à 0,09 point.
2017-2018 (ISF remplacé par IFI, création d’un prélèvement forfaitaire unique de 30% sur les revenus du capital): baisse des départs nets de 0,01 à 0,07 point et légère hausse des retours.
Un poids économique fort du top 1%: environ un cinquième du chiffre d’affaires, de la masse salariale et de la valeur ajoutée générés par des entreprises détenues (au moins en partie) par ces ménages.
Effet d’un départ de propriétaire significatif sur “son” entreprise:
Effets bruts notables à 5 ans (baisse du chiffre d’affaires, de la masse salariale, de la valeur ajoutée).
Effets nets plus faibles une fois comptées les réallocations: rachats/absorptions d’activité, réembauches ailleurs, etc. Et à l’échelle de toute l’économie?
En combinant l’élasticité des départs aux changements d’impôt avec l’effet d’un départ sur les entreprises concernées (après réallocations), l’impact macro reste faible, même pour des réformes d’ampleur:
Scénario “+2 milliards d’euros” ciblés sur le top 1%: impact à long terme de l’ordre de -0,01% à -0,03% selon l’indicateur.
Scénario “+4 milliards d’euros”: environ le double. Dit autrement: même en “borne haute”, on parle de centièmes de point de valeur ajoutée, d’emploi ou de chiffre d’affaires à l’échelle nationale. Pourquoi le débat se trompe souvent de cible
Le débat public se focalise sur la “marge extensive” (partir ou rester). Or, les travaux empiriques montrent que la “marge intensive” (comment on organise son patrimoine, quand on distribue, où l’on déclare, quels montages on utilise) pèse nettement plus lourd sur les recettes. Dans les pays scandinaves, pour 1 euro de recettes “attendues” d’une hausse d’impôt patrimonial:
~0,20 euro “s’évapore” par l’exil fiscal,
mais ~0,54 euro disparaît via l’optimisation/évasion et autres ajustements fins. C’est là que se joue l’efficacité réelle de la politique fiscale Cinq idées à garder en tête 1/ L’exil fiscal existe mais reste un phénomène de niche, mesurable et contenu.
2/ Les réformes pro- ou anti-capital modifient les flux, mais de quelques centièmes de point.
3/ L’économie absorbe une partie des chocs via rachats, fusions, réembauches.
4/ Le rendement net des hausses d’impôts dépend surtout de la capacité à limiter l’optimisation/évasion.
Externalités locales: le départ d’un entrepreneur “pivot” peut-il avoir des effets lents mais importants (réseaux, innovation, formation)? Les mesures à long terme restent difficiles.
Asymétrie: hausses d’impôts et baisses n’ont pas exactement les mêmes effets dans le temps; certains épisodes suggèrent des réponses plus vives aux hausses, au moins à court terme. Pistes concrètes de politique publique Renforcer l’information et le contrôle: interconnexions de bases, traçabilité du patrimoine financier, qualité des déclarations, coopération internationale.
Limiter l’optimisation agressive: assiette large, neutralité des traitements, fermeture des brèches juridiques.
Dispositifs anti-exit ciblés et proportionnés (exit taxes/boucliers anti-abus), avec attention à la sécurité juridique et à la lisibilité du cadre.
Évaluer systématiquement le “rendement social” de ce que financent les hausses d’impôts: si les dépenses soutenues ont un fort impact, le coût en distorsions peut être acceptable. En bref
Si l’objectif est d’augmenter durablement les recettes sans abîmer l’activité, la priorité n’est pas de céder à la peur d’un “exode massif” — que les données ne confirment pas — mais d’améliorer la qualité de l’assiette et l’effectivité du recouvrement. L’économie perd peu par l’exil; elle perd beaucoup par l’optimisation mal encadrée.
Source : Fiscalité du capital : quels sont les effets de l’exil fiscal sur l’économie ?
https://cae-eco.fr/static/pdf/Focus_118_emigration_fiscale_250725_v2.pdf
N.D.L.R
Certes ! Vous trouverez ci-dessous une évaluation, par l’I.A de mon navigateur Dia, de la réelle taxation des riches. Pour résumer on parle d’une taxe envisageable à 2%, alors que la taxation réelle tourne autour de 0,2-0,3 %. Aussi bien en France qu’aux USA. Dans ces conditions, il est évident que les riches n’ont guère d'intérêt à fuir un tel paradis fiscal. Je rappelle qu’en théorie, ils devraient être taxés à 45 % !
Il y a deux façons de taxer les très riches : En proportion du revenu: on parle de “taux effectif sur le revenu” (impôt réellement payé / revenu réalisé).
En proportion du patrimoine: on parle de “taux effectif sur la richesse” (impôt / fortune). C’est crucial, car les ultra-riches peuvent ne presque pas “réaliser” de revenus en gardant les gains latents. Ce que disent les meilleures sources récentes Les estimations internationales récentes de Gabriel Zucman (EU Tax Observatory) trouvent que les milliardaires paient en moyenne un taux effectif équivalent à environ 0,3 % de leur richesse par an. D’autres communications parlent plutôt d’un ordre de grandeur autour de 0,2 %. C’est très loin d’un impôt annuel “à 2 %” sur la fortune.
https://www.taxobservatory.eu/publication/a-blueprint-for-a-coordinated-minimum-effective-taxation-standard-for-ultra-high-net-worth-individuals/
https://news.berkeley.edu/2025/07/25/berkeley-talks-gabriel-zucman-billionaire-tax/
Le “2 %” est la proposition de “minimum tax” coordonnée pour les milliardaires: rendre obligatoire un plancher d’imposition annuel égal à 2 % du patrimoine, précisément parce que le taux effectif actuel est jugé trop bas. https://gabriel-zucman.eu/files/report-g20.pdf Pourquoi l’écart avec les “taux officiels par tranches”? Parce que ces tranches s’appliquent au revenu imposable. Quand la base imposable (revenu) est “pilotée” à la baisse (faibles distributions, report de plus-values, emprunts collatéralisés sur actions, etc.), le taux marginal affiché (45 % en France, 37–40 % aux USA) ne dit presque rien du taux réellement payé à l’année.
Mesuré sur la fortune (patrimoine), l’effort fiscal des ultra-riches ressort donc très faible aujourd’hui, d’où le chiffre que tu as entendu autour de “2 %” — mais c’est bien l’objectif d’une réforme, pas la réalité actuelle. https://www.taxobservatory.eu/publication/a-blueprint-for-a-coordinated-minimum-effective-taxation-standard-for-ultra-high-net-worth-individuals/ À retenir Ordre de grandeur actuel (billionaires): ≈0,2–0,3 % de la richesse par an, en France comme aux USA. https://www.taxobservatory.eu/publication/a-blueprint-for-a-coordinated-minimum-effective-taxation-standard-for-ultra-high-net-worth-individuals/
Le “2 %” est un plancher proposé pour remonter ce taux effectif minimal, https://gabriel-zucman.eu/files/report-g20.pdf