Et si les vrais responsables de l'addiction des enfants, c'était nous ?


Nous avons l'habitude de pointer du doigt cette jeunesse "zombie", hypnotisée par la lumière bleue, incapable de tenir une conversation sans jeter un œil à une notification. En tant qu'adultes, parents ou grands-parents, il est confortable de se placer en observateurs inquiets d'une génération à la dérive. Mais avons-nous seulement le courage de nous regarder dans le miroir ? Une vidéo de l'excellente chaîne : Le Manal Show.



Image : Gemini 3.0

Introduction de la vidéo

Et si les écrans ne se contentaient pas de capter notre attention… mais de reprogrammer notre cerveau ?

🎙️ Dans cet épisode, je reçois le Dr Serge Tisseron, psychiatre, docteur en psychologie, chercheur et membre de l’Académie des technologies.
Depuis des années, il alerte sur l’impact invisible des écrans sur notre façon d’aimer, d’apprendre, de penser… et même d’éduquer.

🧠 Comment les écrans modifient-ils notre développement cognitif et émotionnel ?
📱 Quel est leur effet réel sur les enfants et les ados ?
🔍 Sommes-nous encore libres de notre attention… ou déjà conditionnés ?

Auteur de nombreux ouvrages traduits à l’international, le Dr Tisseron partage ici une analyse lucide, loin des discours alarmistes… mais qui donne à réfléchir.
Si vous avez un téléphone, des enfants, ou simplement un esprit critique, cet épisode est essentiel.

Le Manal Show

👉 Son site internet: https://sergetisseron.com/
Son livre 3-6-9-12: https://urlr.me/en7Zcs
Les Secrets de famille: https://urlr.me/QzEefj

 

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Et si les vrais responsables de l'addiction des enfants, c'était nous ? La vérité dérangeante sur la technoférence.

 
 

Nous avons l'habitude de pointer du doigt cette jeunesse "zombie", hypnotisée par la lumière bleue, incapable de tenir une conversation sans jeter un œil à une notification. En tant qu'adultes, parents ou grands-parents, il est confortable de se placer en observateurs inquiets d'une génération à la dérive. Mais avons-nous seulement le courage de nous regarder dans le miroir ?

Dans une intervention récente qui bouscule bien des certitudes, le psychiatre Serge Tisseron ne se contente pas de répéter les mises en garde habituelles. Il met le doigt sur un tabou moderne : notre propre indisponibilité. Il appelle cela la "technoférence". Ce concept révèle comment nos "juste une minute, je vérifie un mail" au parc ou pendant un repas brisent silencieusement le développement émotionnel de nos enfants. 

Loin des discours moralisateurs classiques, voici une analyse sans concession des mécanismes invisibles qui se jouent entre nous, nos enfants et ces machines qui sont devenues les tiers intrus de nos relations les plus intimes. Préparez-vous, car ce que vous allez lire risque de changer radicalement votre façon d'utiliser votre smartphone en famille.
Le mythe du petit génie de la tablette

Il faut d'abord tordre le cou à une idée reçue tenace, celle de l'enfant "digital native" qui serait naturellement doué pour la technologie. Nous nous sommes tous déjà émerveillés devant un tout-petit faisant glisser une image sur une tablette avec une dextérité apparente, nous persuadant qu'il a "tout compris". Serge Tisseron nous met en garde contre cette illusion de compétence.

La réalité biologique est bien différente. Pour construire son intelligence, un cerveau en développement a besoin d'appréhender le monde en trois dimensions. Lorsqu'un enfant manipule une vraie tasse, il en ressent le poids, la texture, il comprend qu'elle a un envers et qu'elle peut se casser si elle tombe. Sur l'écran, la tasse n'est qu'une image plate, sans conséquence physique. 

L'abus d'écrans chez les plus jeunes ne fabrique pas des génies précoces, mais prive au contraire leur cerveau des expériences sensorielles fondamentales qui sont les seules bases solides de l'intelligence future.
L’interférence technologique ou Technoférence : quand le parent devient un visage de marbre

C'est sans doute le point le plus culpabilisant, mais aussi le plus nécessaire à entendre. L'expert déplace le projecteur de l'enfant vers l'adulte avec ce concept de "technoférence", ou interférence technologique. Le danger n'est pas seulement ce que l'enfant regarde, mais ce que le parent ne regarde plus : son enfant.

Imaginez une scène banale : un parent donnant le biberon ou promenant une poussette tout en consultant ses notifications. Physiquement, l'adulte est là. Mais psychiquement, il est absent. Pour le bébé, qui apprend à exister en décryptant les réactions sur le visage de ses figures d'attachement, c'est une catastrophe. Il se retrouve face à un visage inexpressif, un "visage de marbre". Cette rupture répétée de l'interaction crée une insécurité affective profonde. L'enfant intègre très tôt que cet objet rectangulaire dans la main de son parent est plus captivant, plus important que lui. Protéger nos enfants des écrans, c'est d'abord, pour nous adultes, réapprendre à être pleinement disponibles.
Le syndrome du “Pop-corn Brain” (brain=cerveau) et la fatigue décisionnelle

Pourquoi nos adolescents, et nous-mêmes, semblons-nous parfois incapables de nous concentrer plus de quelques minutes ? Tisseron utilise l'image parlante du "Cerveau Pop-corn". Ce terme décrit un esprit qui sautille en permanence, sur-stimulé et incapable de se fixer.

Le mécanisme derrière ce phénomène est purement cognitif. Sur les plateformes de vidéos ultra-courtes, le cerveau n'est pas passif comme devant un film. Il est en état d'hyper-sollicitation décisionnelle. À chaque vidéo de quinze secondes, il doit trancher : "J'aime, je reste" ou "Je n'aime pas, je passe". Cette prise de décision binaire, répétée des centaines de fois par heure, épuise littéralement nos ressources mentales. C'est la raison pour laquelle, après une heure de défilement, on se sent vidé, incapable d'entamer une tâche complexe. Nous avons dilapidé notre "capital volonté" sur du vide.
Votre smartphone est un casino de poche

Si nous n'arrivons pas à décrocher, ce n'est pas par manque de volonté, mais parce que nous sommes manipulés par des mécanismes dignes des jeux d'argent. L'expert compare nos applications aux machines à sous des casinos, exploitant notre “aversion à la perte”.

Les algorithmes sont conçus pour ne pas nous montrer que du contenu exceptionnel. Ils alternent savamment le médiocre et l'intéressant de manière aléatoire. Comme le joueur qui remet une pièce dans la machine en espérant le jackpot, nous continuons de faire défiler l'écran par peur de rater la pépite qui pourrait surgir juste après la vidéo ennuyeuse du moment. Cette incertitude active notre circuit de la récompense et rend la lutte inégale entre notre cerveau archaïque et la puissance de calcul des géants du numérique.
Le “Terrier du Lapin” ou la fin de la curiosité

Une autre métaphore utilisée par Serge Tisseron est celle du "Terrier du Lapin". Contrairement à une bibliothèque où l'on peut flâner et découvrir un livre par hasard, l'algorithme a pour mission de nous enfermer dans ce que nous aimons déjà pour maximiser notre temps de présence.

C'est une véritable atrophie de la curiosité. Si un utilisateur commence à s'intéresser à un sujet, même toxique comme des théories du complot ou des contenus dépressifs, la machine va creuser un tunnel et l'inonder exclusivement de ce type d'informations. L'utilisateur a l'illusion du choix, alors qu'il est prisonnier d'une réalité alternative fermée, perdant peu à peu sa capacité à confronter ses idées à la contradiction.
L'impact invisible sur l'empathie

Enfin, il existe un risque majeur pour le "vivre ensemble" : la perte de la capacité à lire les émotions d'autrui. Tisseron rappelle que l'empathie n'est pas innée, elle s'entraîne en décodant les micro-expressions sur les visages humains en temps réel.

Or, les personnages de jeux vidéo ou de dessins animés arborent souvent des visages aux émotions simplifiées, outrancières ou figées. Un enfant gavé d'images artificielles perd l'entraînement neuronal nécessaire pour saisir les subtilités d'un vrai visage humain, comme l'ironie légère, l'ennui ou la tristesse contenue. Le risque est de voir grandir une génération moins capable de comprendre ce que ressent l'autre, non par cruauté, mais par analphabétisme émotionnel.
Pourquoi la Digital Detox est une erreur

Face à ces constats, la tentation est grande de tout couper. Pourtant, Serge Tisseron critique sévèrement la mode de la “Digital Detox. Pour lui, cela s'apparente aux régimes draconiens : on se prive totalement pendant une semaine, pour mieux se gaver ensuite par effet de compensation.

La solution réside plutôt dans une “diététique des écrans” quotidienne et raisonnée. L'objectif n'est pas l'abstinence, impossible dans notre monde connecté, mais la compartimentation. Il suggère d'instaurer des zones et des temps sacrés : jamais d'écrans le matin avant l'école pour préserver l'attention, aucune technologie pendant les repas pour favoriser l'échange verbal, suppression totale avant le sommeil, et surtout, pas d'écrans dans la chambre de l'enfant. 

Cette approche pragmatique vise à construire une autonomie durable plutôt qu'une interdiction vouée à l'échec. C'est à nous, adultes, de montrer l'exemple et de reprendre le contrôle de notre attention pour offrir le meilleur de nous-mêmes à nos proches.


 


Lundi 24 Novembre 2025
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